Vous trouverez sur cette page mon manifeste. Il condense mes apprentissages et ma vision du monde des entreprises du digital, forgée par mon expérience sur le terrain (lire mon "À propos").
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J'ai été data scientist puis responsable IA chez Jow, où mes algorithmes influençaient 5 millions d'utilisateurs. Consultant auprès de dizaines d'entreprises Tech, j'ai vu de partout les mêmes symptômes d'un système défaillant.
La Tech est le révélateur le plus brutal de cette souffrance. En bout de chaîne, elle paie le prix fort de tous les dysfonctionnements en amont. Quand le marketing a une vision court-terme, c'est la Tech qui trinque. Quand la direction change de cap tous les trimestres, c'est la Tech qui doit tout reconstruire. Quand le produit accumule la dette technique pour tenir des deadlines arbitraires, c'est la Tech qui s'enlise.
Le problème est bien plus large. Tous les départements sont victimes de ce même système. Les commerciaux courent après des objectifs toujours plus hauts, le marketing réinvente sa stratégie chaque mois, les product managers jonglent entre des demandes contradictoires. La direction elle-même est prisonnière, forcée de réagir aux moindres soubresauts du marché.
Le bilan ? Des résultats décevants, des délais qui s'allongent, des tensions en interne, des talents qui partent épuisés, des parts de marché qui stagnent. L'entreprise perd sa flamme.
Ce qui me révolte, c'est qu'on laisse tomber le monde de la Tech. Cet univers qui fourmille d'idées, qui aide des millions de personnes, qui crée de la richesse. On se résigne en disant que "c'est normal", que "c'est partout pareil". Moi, je refuse d'accepter que des équipes brillantes ne voient pas le fruit de leur travail.
On vaut mieux que ça. Surtout que ces problèmes ne sont que des symptômes. Des symptômes d'un mal plus profond qui ronge nos entreprises.
Face à ces problèmes, on applique les mêmes sparadraps : réorganiser, recruter, former, multiplier les workshops, refondre les process.
Pourquoi ces symptômes persistent-ils ? Ce n'est pas un problème de compétences - les équipes sont brillantes. Ce n'est pas un problème de ressources - même les entreprises bien dotées souffrent. Ce n'est pas un problème de méthodes - les meilleurs process n'y changent rien.
Le vrai problème est notre manque de direction. On ne sait pas où on va. Chaque département se retrouve alors à faire du court-terme, empilant les couches de complexité. L'urgent écrase l'important. Nous réagissons au lieu de créer. Nous nageons en plein chaos.
Et si on se posait la vraie question : pourquoi sommes-nous incapables de définir une direction ? La réponse se cache dans notre façon même d'aborder le travail.
Notre façon d'aborder le travail est le problème. Nous raisonnons uniquement en termes de "jeux finis", un concept de James Carse. Ce sont ces parties qu'il faut absolument gagner : un projet à livrer, un objectif à atteindre, une deadline à tenir. Chaque initiative devient un nouveau jeu à terminer le plus vite possible, dans l'espoir que ça sera "le bon". Mais dans les faits, combien ont changé la donne ?
Cette obsession des jeux finis nous aveugle. Même nos tentatives de vision long-terme (OKRs, plan à 5 ans...) ne sont que des jeux finis à plus grande échelle. On repousse l'échéance sans résoudre le problème fondamental.
Les conséquences sont dévastatrices :
Nos gains sont incertains. Impossible de savoir si on a vraiment gagné, et quand on gagne, c'est souvent moins que prévu. Un gaspillage de temps, d'énergie et d'argent.
Les règles changent constamment. Le marché évolue, les priorités se réalignent, une complexité technique surgit. C'est comme si on changeait les règles des échecs en pleine partie.
Nous construisons sur du sable. Focalisés sur les gains rapides, nous accumulons de la dette technique, des solutions temporaires, des compromis qui nous rattrapent. Rien n'est bâti pour durer.
Nous ratons des opportunités majeures. Trop focalisés sur les jeux en cours, nous passons à côté de jeux qui auraient pu nous faire gagner gros.
Des dynamiques toxiques s'installent. Chacun devient la marionnette de l'autre : managers, équipes, direction - tous prisonniers d'une chaîne sans fin où chacun manipule l'autre pour finir son propre jeu.
J'en ai fait l'expérience. Je m'étais créé un système parfait pour enchaîner les projets toujours plus vite. Je gérais 7 projets par semaine, optimisant chaque minute. Je pensais que c'était la clé de l'impact. Mais impossible de répondre à la vraie question : est-ce que je jouais aux bons jeux ?
Pour sortir de ce piège, il faut se reconnecter à quelque chose d'essentiel. Il ne s'agit plus d'optimiser nos jeux finis, ni créer quelque chose de nouveau, mais redécouvrir ce qui a toujours été là : le jeu infini.
Les jeux finis ne sont pas mauvais en soi. Ils sont essentiels pour passer à l'action et atteindre nos objectifs.
Mais nous avons oublié quelque chose de fondamental : chaque entreprise est, par essence, un jeu infini. Dès sa création, une entreprise naît avec une dynamique originelle de croissance et d'expansion : générer toujours plus d'impact, servir toujours plus de clients, créer toujours plus de valeur. C'est sa raison d'être.
Cette déconnexion est le véritable poison. On s'épuise à jouer à un jeu qu'on n'a jamais défini : objectif, règles, actions possibles. Pire, on traite chaque initiative comme un coup isolé à jouer : "On a fait 100M de CA, c'est bon, on a fini". Mais une entreprise qui "finit" est une entreprise qui meurt. Le véritable enjeu n'est pas de finir, mais de perpétuer cette dynamique originelle, toujours plus fort, toujours plus loin.
Les équipes elles-mêmes incarnent cette dynamique. Une équipe tech n'existe pas pour livrer une feature et passer à autre chose. Sa vocation est d'amplifier continuellement la capacité de l'entreprise à créer de la valeur. Une équipe commerciale n'est pas là pour atteindre un quota et s'arrêter. Elle poursuit la dynamique d'expansion continue de l'entreprise.
L'enjeu est donc de définir ce jeu infini pour ne pas s'épuiser au jeu. Cette reconnexion passe par 3 éléments clés :
Redéfinir notre vocation - non pas comme un objectif à atteindre, mais comme un horizon vers lequel tendre continuellement
Établir nos règles du jeu - les principes qui guident nos décisions et maintiennent notre dynamique
Identifier nos mouvements possibles - les actions qui nous permettent d'avancer tout en restant fidèles à notre raison d'être
2 exemples concrets :
Une équipe tech ne sert pas juste à livrer des features. Son jeu infini : "permettre à l'entreprise de créer toujours plus de valeur". Chaque feature, chaque amélioration technique devient alors un mouvement dans cette expansion continue. L'équipe identifie les freins qui ralentissent cette dynamique (dette technique, processus complexes) et les leviers qui l'accélèrent (automatisation, simplification des outils).
L'équipe commerciale n'est pas juste là pour signer des clients. Elle retrouve sa vocation première : "étendre l'impact de l'entreprise sur le marché B2B". Chaque signature n'est plus une fin en soi, mais une étape dans cette dynamique d'expansion. L'équipe analyse les freins qui limitent cette expansion (processus d'onboarding lent, rétention faible) et les leviers qui l'amplifient (satisfaction client, effet réseau).
Cette reconnexion transforme notre rapport aux opportunités. Chaque pas n'est plus une fin en soi, mais ouvre de nouvelles possibilités. Une feature réussie révèle de nouveaux axes d'amélioration, une signature client dévoile de nouveaux marchés à conquérir. L'horizon s'élargit à mesure qu'on avance.
Les règles du jeu deviennent notre boussole. Elles ne sont pas des contraintes qui limitent, mais des filtres qui guident. Face à chaque opportunité, elles nous permettent de trancher : cette action alimente-t-elle notre dynamique ou nous en détourne-t-elle ?
Cette clarté se diffuse à tous les niveaux :
L'entreprise redécouvre sa dynamique globale d'expansion
Les départements précisent cette dynamique dans leur domaine
Les équipes l'adaptent à leur réalité terrain
Nos indicateurs changent de nature. Ils ne sont plus des objectifs à atteindre, mais des signaux qui nous indiquent si notre dynamique s'amplifie. Si les indicateurs stagnent, on affine les règles pour retrouver l'élan. Le passé nous guide vers un meilleur futur.
Cette nouvelle perspective transforme nos choix. Nous pouvons enfin :
Identifier et prioriser les jeux finis qui nourrissent notre dynamique
Éviter ceux qui nous en détournent
Transformer chaque action en impact
Bref, elle permet de jouer aux bons jeux.
Cette reconnexion nous libère. Elle nous permet de voir les jeux finis pour ce qu'ils sont : des mouvements dans une dynamique plus grande. Certains alimentent notre élan, d'autres le freinent. Cette clarté transforme notre façon de prioriser et d'agir.
Elle ravive notre élan originel. Quand on se reconnecte à cette dynamique sans fin, les limites artificielles tombent. Nous ne sommes plus des exécutants qui cochent des cases, mais des acteurs qui alimentent un mouvement perpétuel.
Le résultat est transformateur. Les équipes retrouvent leur souffle. Les décisions deviennent des formalités car alignées avec notre dynamique fondamentale. Les actions s'enchaînent avec fluidité, chacune nourrissant un élan plus grand. Je suis toujours émerveillé de voir les résultats arriver plus vite, plus forts, quand les équipes se reconnectent à leur dynamique originelle.
Pour réussir cette transformation, je crois en 3 principes fondamentaux.
Une approche systémique avant tout Une entreprise est un système avec ses sous-systèmes. Chaque niveau définit sa boussole et ses règles, alignées avec l'ensemble mais adaptées à sa réalité. Comme des poupées russes, chaque niveau enrichit la direction tout en restant cohérent.
Des règles concrètes plutôt que des mots qui sonnent bien Notre horizon et nos règles doivent être précis et mesurables. Ils doivent permettre de trancher : "Cette action alimente-t-elle notre dynamique ?" Ce n'est pas un exercice de communication, c'est un outil de décision.
S'adapter au contexte plutôt qu'imposer un cadre La boussole et les règles émergent du terrain. C'est en comprenant comment les équipes travaillent, leurs contraintes et leurs aspirations, qu'on peut les aider à formaliser leur propre direction.
Je joue au jeu suivant : aider des centaines d'équipes et d'entreprises à définir leur propre jeu infini.
Cette mission, je la mène avec les 3 valeurs qui me tiennent à cœur : pragmatisme, pédagogie et structure.
Je crois qu'au fond, la meilleure stratégie n'est pas d'enchaîner les jeux finis plus vite. C'est de redécouvrir le jeu infini qui révèlera ceux qui comptent.
Si vous avez lu jusqu'ici, c'est le moment de commencer à prioriser à la valeur en :
Suivant cette masterclass gratuite de 35 min
Me contactant directement par email (damien_chambon@outlook.com) pour mettre en place cette approche avec vos équipes
Merci de m'avoir lu jusqu'ici.
Damien Chambon